
« Contre le fascisme, l’espoir est une exigence absolue », déclarait l’activiste étasunienne Angela Davis, plusieurs fois invitée au FIFDH ces dernières années. Un mot d’ordre que les deux directrices du festival international du film des droits humains ont rappelé lors de la présentation du programme de sa vingt-troisième édition qui aura lieu à Genève du 7 au 16 mars 2025.
Mettant en avant « le pouvoir du cinéma pour transformer les récits dominants et imaginer de nouveaux futurs » dans ce contexte mondial extrêmement menaçant et anxiogène, le FIFDH nous invite à reconsidérer nos systèmes politiques et à faire communauté face à l’ascension des mouvements d’extrême droite et la menace aux droits fondamentaux qu’elle représente, en particulier pour les femmes et les minorités. En résumé, « nous devons réfléchir, mais aussi nous remobiliser », exhorte la co-directrice Laila Alonso Huarte.
Ainsi, le festival propose de se rassembler autour d’approches collectives porteuses d’actions, pour « transformer l’indignation et la colère en solidarité et bienveillance ». Cette édition donne la parole à de nombreux invités inspirants, comme par exemple la Prix Nobel de la paix Oleksandra Matviichuk, l’activiste Paul Watson (fondateur évincé de l’ONG Sea Shepherd), l’écrivain Douglas Kennedy, la journaliste de la web TV Blast Salomé Saqué, le chirurgien Ghassan Abu Sittah et l’actrice Angela Molina.
« Les invité·es de cette édition nous encouragent à repenser le collectif, à placer le soin et la solidarité au cœur de nos relations, et à ne pas céder à la sidération face aux conflits meurtriers, au recul des libertés et au non-respect du droit international. »
Laila Alonso Huarte et Laura Longobardi, co-directrices éditoriales.
Le FIFDH propose comme toujours une sélection de films documentaires et de fiction, avec, pour la première fois, une série de courts métrages. Toujours en lien avec l’actualité, il nous sensibilise sur les résistances et la résilience des populations civiles: au Liban, au Soudan, à Gaza, en Ukraine ou en RD Congo et aussi face à la montée du fascisme aux Etats-Unis et en Europe.
Parmi les films présentés, A State of Passion documente le travail du Dr Ghassan Abu Sittah, chirurgien britanno-palestinien engagé sous les bombardements à Gaza. Il sera présent lors d’un Spotlight, aux côtés de la rapporteuse spéciale du Haut-Commissariat des Nations Unies aux droits de l’homme Francesca Albanese. En parallèle, les publics peuvent visionner The Bibi Files, présélectionné aux Oscars 2025, qui explore les dynamiques de corruption et les intérêts personnels du Premier ministre israélien Netanyahou à prolonger le conflit à Gaza.
Des inquiétudes pour le droit humanitaire
Alors que la coopération internationale subit une pression croissante et des coupes budgétaires majeures, la Suisse se retrouve au cœur des discussions. Ces décisions politiques risquent d’avoir un impact durable sur les populations vulnérables, sur la Genève internationale et sur l’image d’un pays qui a longtemps défendu sa neutralité par son engagement humanitaire. Ces enjeux sont au centre de la discussion Remise en cause de l’UNRWA: mort du droit humanitaire? Un échange avec, notamment, le Commissaire général de l’UNRWA Philippe Lazzarini et l’ancien ambassadeur de Suisse en Israël Jean-Daniel Ruch. Ce Forum est précédé du film UNRWA, septante-cinq ans d’une histoire provisoire, présenté en première mondiale.
Yves Daccord, le président du FIFDH s’inquiète quant à lui de l’avenir du financement du festival par la Confédération et de son soutien en général: « le dialogue entre nous et le Département fédéral des affaires étrangères (DFAE) reste sympathique mais perd de sa substance ». Il en veut pour preuve l’absence d’intérêt de la part de conseillers fédéraux pour participer à l’événement, mais aussi une frilosité quant à l’idée de projeter les films sélectionnés dans les ambassades suisses, alors que c’était le cas il y a plusieurs années. Il déplore « une neutralité hôtelière, où l’on évite de fâcher qui que ce soit », avec une inquiétude particulière par rapport à l’écosystème d’experts, d’organisations, de gens qui réfléchissent sur la question des droits humains: « c’est un retrait qui a de l’impact au plus mauvais moment ». Il espère un sursaut de la Suisse, que le pays se rende compte qu’il a un rôle à jouer.
Retrouvez le programme complet des films, des événements et la liste des invités sur fifdh.org