Le Festival du film et forum international sur les droits humains de Genève (FIFDH), après s’être doté d’une nouvelle direction à deux têtes, dévoile le programme de sa 21e édition qui aura lieu du 10 au 19 mars 2023. Composée de sujets brûlants qui rythment l’actualité locale et internationale, la programmation 2023 a « l’humiliation pour fil rouge » et invite à une réflexion autour d’enjeux politiques, éthiques et symboliques.

Cette nouvelle édition du FIFDH coïncide avec un jubilé symbolique: « commémorer les septante-cinq ans de la Déclaration universelle des droits de l’Homme incite à considérer ces droits à la croisée de leurs continuités, ruptures et émergences. Le FIFDH Genève aborde ainsi avec une égale acuité des thèmes aussi complémentaires que l’humiliation comme outil d’oppression, l’extension des droits universels au monde du vivant ou les écueils éthiques à l’ère numérique » indique Irène Challand, directrice des programmes du FIFDH.

« Pour pouvoir changer notre monde il faut s’autoriser à en imaginer un autre.  »

Ali Cherri, invité de la 21e édition du FIFDH, pour L’Orient-Le Jour, 16 mai 2022

Des invités marquants et engagés

Plus de deux cents invités ont répondu présents. Parmi eux le réalisateur et plasticien libanais Ali Cherri, l’activiste canado-somalienne lauréate du Right Livelihood Award, Ilwad Elman, la chanteuse et défenseuse des droits des femmes kurde, Mutlu Kaya, le journaliste et documentariste afghan Abbas Rezaie, la journaliste d’investigation et auteure française Garance Le Caisne, le réalisateur franco-congolais Alain Kassanda, la productrice kényane, membre votante de l’Académie des Oscars en 2020, Toni Kamau, le cinéaste documentariste français Nicolas Philibert, la journaliste féministe et créatrice de podcasts Victoire Tuaillon (Les Couilles sur la table) ou encore le photographe suisse Christian Lutz. Parmi la centaine d’invités, l’identité d’activistes iraniennes n’est pas révélée pour des raisons de sécurité. La féroce répression en Iran et la guerre en Ukraine feront l’objet d’une table ronde et de la projection de deux films.

Le pouls d’un monde sous tension – conflits, environnement et migration

Le public sera notamment invité à suivre les journalistes dans le huis clos d’une rédaction au moment de la prise de pouvoir des Talibans en Afghanistan. Un autre documentaire plongera l’audience dans l’Opération César qui a révélé au grand public des crimes contre l’humanité commis par le régime de Bachar El-Assad en Syrie. Le débat qui suivra fera la lumière sur la bataille juridique menée par l’avocate Clémence Bectarte et le protagoniste du film, Obeida Dabbagh, pour faire reconnaître ces crimes.

L’environnement sera un thème central de le programmation, notamment avec un documentaire sur le premier avocat à avoir poursuivi avec succès une multinationale et un gouvernement pour leurs abus et négligences au détriment de l’environnement. L’écologie sera également traitée sous un angle décolonial, en articulant les questions de classe, d’origine et de genre, pour s’extraire d’un narratif unique et mettre en avant la diversité des vécus. L’autrice Myriam Bahaffou, militante écoféministe décoloniale et antispéciste en débattra avec Vandana Shiva, cheffe-de-file de l’écoféminisme mondial et l’activiste Cannelle Fourdrinier. La migration et les déplacements forcés marquent notre époque. Cet enjeu sera abordé avec un forum autour des différences dans l’accueil des migrants et d’un film La vie devant elle de Manon Loizeau. Ce documentaire prend la forme du journal intime de la jeune Elaha Iqbali, Afghane de 14 ans, un récit de son exil entre solitude, fatigue mentale et instabilité.

Réflexions autour de la décolonisation et cinéma suisse

Après l’accession à l’indépendance de nombreuses nations et de peuples, l’ère postcoloniale a fait l’objet de multiples réflexions politiques et sociologiques et a été marquée par l’émergence d’œuvres artistiques maîtrisées par les protagonistes eux-mêmes. Un débat autour de la décolonisation du récit sera proposé avec la productrice kényane Toni Kamau et le réalisateur sri-lankais Sanjeewa Pushpakumara. Une décolonisation qui sera également au centre d’une discussion autour du film controversé H2: The Occupation Lab . A travers des images d’archives rares et des entretiens, le film raconte comment la ville palestinienne d’Hébron a servi de laboratoire politique pour les méthodes de contrôle d’Israël, et insiste sur les conséquences néfastes de la colonisation.

Le cinéma suisse aura une place de choix lors de cette 21e édition avec la présence d’une génération montante de nouveaux cinéastes. Entre autres Carmen Jacquier, lauréate du prix de la mise en scène au Festival international de Marrakech (FIFM) présentera son film Foudre et Simon David qui nous conduira dans la ZAD de la colline du Mormont avec son film Zadvengers.

Technologie et droits humains

Des nouvelles technologies qui mettent également en péril la sécurité de nos données, et ouvrent la voie à leur pillage. En 2021, un consortium de journalistes dénonçait l’usage d’un logiciel espion, Pegasus, utilisé par 65 États pour espionner à distance des milliers de défenseur des droits humains, journalistes, et opposants politiques. Présenté en première mondiale, Pegasus, un espion dans votre poche d’Anne Poiret revient sur ce scandale. Le journaliste français Laurent Richard du réseau Forbidden Stories et la journaliste et militante catalane Txell Bonet, victime de ce logiciel, en débattront sur la scène du FIFDH.

Enfin, un premier forum visera à définir l’usage de l’humiliation dans les relations internationales et un second abordera son application concrète, comme un outil d’oppression et domination en Palestine.

Infos et programme complet à découvrir sur fifdh.org